Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol                                       PARU DANS  LES CAHIERS DE L’ HISTOIRE N° 22 - 2020

 

Les masques vénitiens

par Michel Gô et Jean-Charles Pétronio

 

 

Dites seulement l’un des mots suivants : Gondole, Place Saint-Marc, Ponts des Soupirs ou du Rialto, Grand Canal, Palais des Doges ou encore Plage du Lido ou Carnaval et l’on vous répondra aussitôt : Venise.
Même si un bref rappel historique me semble approprié, mon but n’est pas ici de remonter le cours d’une capitale vénète dans tout ce qu’elle a d’attrait pour le touriste. Il est plutôt de vous conter, au travers de quelques pièces de ma collection personnelle, une passion sur laquelle le temps n’a pas posé la moindre ride, celle du masque vénitien.
Fuyant l’invasion des Lombards venus de la Baltique, originaires de Scandinavie méridionale et assimilables au groupe des Germains de l’Elbe, un peuple s’établit sur les rives de la mer Adriatique au nord-est de l’Italie, en 528. Il parle le vénète, une langue assez proche de celle des Romains. Cette région va devenir la Vénétie dont la capitale sera la ville côtière de Venise située au milieu d’une lagune entre les estuaires du Pô, le plus grand fleuve d’Italie, et du Piave. Cette lagune est composée de 121 petites îles séparées par tout un réseau de canaux qu’enjambent 435 ponts reliant les différents « sestieri » (quartiers).


Si la commune compte aujourd’hui un peu plus de 260.000 habitants, seuls 60.000 vivent dans le centre historique. Durant onze siècles, exactement de 697 à 1797, Venise fut une république florissante dirigée par des Doges (il y en eut 120, le premier étant Paolo Lucio Anafesto), personnages influents élus à vie qui centralisaient entre leurs mains tous les pouvoirs, législatif, exécutif et judiciaire. Sous leur gouvernement, au Moyen Âge et à la Renaissance, Venise devint une grande puissance maritime et l’une des principales places commerciales d’Europe pour la soie, les céréales et les épices importées du Proche Orient et d’Asie. Cette hégémonie commerciale, à l’époque des grands voyageurs tel Marco Polo, favorisa la naissance d’un centre culturel qui fit de Venise, du XIIIème au XVIIème siècles, le berceau de la peinture (école vénitienne avec Le Titien, Le Tintoret, Véronèse), de la musique (Vivaldi) et de la littérature (Goldoni).


Les spectacles publics du Carnaval de Venise remontent au Xème siècle. Ils se déroulent alors durant la semaine qui précède la période du Carême. Vitale Faliero de Doni, le 32ème Doge de la cité, en fait mention dans un édit de 1094. Le but, durant ces fêtes, était d’abroger toutes les contraintes sociales et politiques de l’année et de faciliter le contact entre les diverses couches de la population. L’aristocratie se mêlant au peuple, masques et costumes vont garantir, pour la durée du Carnaval, l’anonymat à toutes les classes en faisant fi de tous les préjugés pour oublier en toute liberté les soucis quotidiens. Des jeux publics ponctuaient à l’époque ces fêtes carnavalesques. Parmi eux il y avait la pyramide humaine (perpétuée de nos jours encore par les « Castells » catalans), aux XIIIème et XIVème siècles la chasse aux porcs à l’issue de laquelle le sacrifice rituel de douze porcs donnait lieu à une distribution gratuite de viande puis au XVIème siècle la chasse aux taureaux qui relevait du même cérémonial. Deux de ces spectacles incontournables sont à l’honneur de nos jours encore après avoir disparu durant de très longues années, il s’agit du « Vol de l’Ange » et de la « Fête des Maries » dont je vous dirai quelques mots plus loin.
Au XVIème siècle, l’opéra fait son apparition et remplace peu à peu les représentations théâtrales populaires pour accueillir, au XVIIème siècle, les têtes couronnées d’Europe. À l’époque baroque le Carnaval est à son apogée et les tableaux que nous ont laissés les peintres Longhi, Tiepolo, Canaletto ou Guardi en témoignent. Les fêtes peuvent durer jusqu’à six mois de l’année (de l’Épiphanie au Carême, en mai-juin et à l’automne), peut-être pour masquer le déclin commercial et la déchéance politique de Venise « la Sérénissime ». Durant l’occupation napoléonienne le Carnaval est interdit par peur de fomentation de complots sous l’incognito du masque. L’enthousiasme populaire reprend quelque peu ensuite pour s’éteindre et enfin disparaître jusqu’en 1979 où il va vraiment renaître et atteindre son apogée à l’initiative des Vénitiens eux-mêmes, de la municipalité, de la fondation « Biennale de Venise » et de l’Opéra « la Fenice ».  


Depuis, les visiteurs se pressent par dizaines de milliers pour cet événement aussi spectaculaire que touristique et dont l’engouement n’a d’égal que l’enjeu économique qu’il génère. Si la tradition du lancer d’œufs remplis d’eau de rose sur les jolies femmes et d’œufs pourris sur les moins belles a disparu en 1268, les attractions des musiciens et danseurs, des acrobates et jongleurs remémorent les images du passé médiéval. Et les nombreux spectacles publics sur les places, notamment la place Saint-Marc (Piazza San Marco)ne le cèdent en rien aux divertissements privés des palais et restaurants. Les festivités se tiennent durant les dix jours précédant le mercredi des Cendres qui marque le début du Carême. Elles s’ouvrent par le « Vol de l’Ange » le premier dimanche du Carnaval. Cette tradition qui remonte au milieu du XVIème siècle, appelée aussi « Vol du Turc », voyait le saut d’un invité secret de Venise qui se lançait, masqué et tenu par un filin, depuis le haut du campanile de Saint-Marc pour se poser au centre de la place. La légende veut qu’en 1558 un funambule turc ait ainsi atteint le clocher mais, en 1759, la chute de l’acrobate s’écrasant dans la foule interrompit la tradition. Dès lors une grande colombe de bois déversant fleurs et confettis remplaça l’équilibriste, devenant ainsi le « Vol de la Colombe ». En 2001, le « Vol de l’Ange » reprit, effectué à nouveau par un acrobate puis par des célébrités. Depuis 2011 c’est une jeune fille, la reine de la « Fête des Maries » de l’année précédente, qui a l’honneur, tenue par un filin, de se jeter courageusement du haut du campanile pour rejoindre son amoureux au centre de la place. Mais qu’est-ce donc que la « Fête des Maries ? ».


Cette fête qui revêt un caractère aussi particulier que très spectaculaire se déroule toujours dans l’après-midi du premier samedi du Carnaval. On retrouve trace de sa célébration en 1143 et elle semble s’être poursuivie jusqu’en 1379 où elle tomba quelque peu en désuétude. L’histoire est la suivante. Depuis l’an 948, le 2 février, jour de la Présentation de Jésus au Temple et de la Purification de la Vierge Marie, la coutume était de célébrer la bénédiction des femmes à la basilique « San Pietro di Castello » en même temps que les mariages de douze jeunes filles parmi les plus pauvres et les plus belles des différents quartiers de Venise. Or, en 973, en pleine solennité de ces mariages, des brigands avaient investi l’église, fait main basse sur l’or, les bijoux et les cadeaux et enlevé les douze jeunes filles. Le Doge, à la tête des Vénitiens, mit sur pied une expédition punitive, parvint à capturer les brigands qu’il fit jeter à la mer, libérant les nouvelles épousées et récupérant ce qui avait été volé. Pour mettre à l’honneur cet heureux dénouement, on instaura la « Fête des Maries » (Festa delle Marie). Et chaque année un défilé des plus belles femmes de Venise, parmi lesquelles douze jeunes filles nubiles, part de l’église « San Pietro Castello » pour se diriger, au milieu d’une foule de masques et de costumes ainsi que de touristes, vers la place Saint-Marc. Ce défilé de passementeries et de galons chamarrés est accompagné d’un long cortège de demoiselles d’honneur, de musiciens, de danseurs et de plusieurs centaines de personnages costumés et masqués. Une longue succession de bateaux et de gondoles traverse les canaux. Repas, danses, concerts organisés par les Vénitiens offrent aux nombreux touristes un tableau varié de divertissements tandis que les cloches des églises de la ville sonnent à toute volée pour les événements religieux. La plus belle des « Marie » est élue à la fin du défilé. Elle aura le redoutable et courageux honneur d’ouvrir les festivités du Carnaval en s’élançant du campanile pour le « Vol de l’Ange » de l’année suivante. Dans le cortège de bateaux il peut se trouver aussi l’effigie d’un gros rat qui finit par exploser, libérant dans des nuages de fumée une myriade de confettis et qu’on appelle « le Vol du Rat ».
La magie du Carnaval de Venise tient aux costumes historiques et aux masques de la « Commedia dell’Arte » (étymologiquement théâtre interprété par des gens de l’Art), un genre de théâtre populaire italien du XVIème siècle dans lequel les acteurs masqués improvisaient des comédies et rivalisaient de naïveté, de ruse, d’ingéniosité et parfois de rouerie. Tous les personnages, et ils sont nombreux, s’y expriment dans un dialecte différent toujours en rapport avec leurs aptitudes. Ils peuvent être répertoriés en trois groupes. Tout en bas de l’échelle sociale on trouve les valets (zannis), serviteurs et domestiques issus du petit peuple mais dont chacun possède sa propre personnalité.
Parmi eux il y a Arlequin (Arlecchino) le bouffon, Scaramouche (Scaramuccia) bagarreur et méchant qui finit toujours par être mis en déroute, le fourbe Mezzetin un second Arlequin. Il y a aussi le rusé et querelleur Brighella (« briga » signifiant tracas en italien) originaire comme Arlequin de Bergame en Lombardie. Comme Scapin il est fourbe, trompeur, manipulateur et intrigant, insolent avec les femmes et fanfaron lorsqu’il n’a rien à craindre. Souvent aubergiste, il peut aussi être sergent, clerc ou valet. Il porte parfois un manteau et est coiffé d’une toque à lisérés verts. Son nez est crochu et supporte un masque couleur vert olive. Sa grosse moustache remonte jusqu’aux oreilles, ses sourcils sont proéminents et ses yeux enfoncés. Il se moque des vieillards, des amoureux et des avares.

 
Scaramouche     .................     Mezzetin    ................... Brighella           ................. Scapin          .............. Sganarelle            ...............Paillasse

Scapin (Scappino) et Sganarelle sont fourbes et menteurs, toujours prêts à tromper mais poltrons dès que cela tourne mal pour eux. Pagliaccio (Paillasse) est exposé aux tracasseries des autres,
        

Polichinelle (Pulcinella) est un paysan pas malin et Pedrolino (qui a donné notre personnage Pierrot) un amoureux transi, bien mis de sa personne mais maladroit au possible. Il est le valet de la Signora, ne porte pas de masque et a son visage enfariné.


Polichinelle         ............................Pierrot                   ...............  Signora....................Pantalone                ....... Tartaglia             Il Dottore

Puis viennent les vieillards souvent marchands, avares et vicieux comme Pantalone (Pantalon). C’est un personnage âgé, maigre et voûté, à la voix de crécelle, un commerçant vénitien très riche, veuf et à la retraite, attiré par les jeunes filles qui ne veulent pas de lui pour mari. Il se montre très dur envers ses serviteurs qui n’ont de cesse de le voler pour le punir de son avarice. Il a plusieurs filles issues de son mariage, comme Isabella, Smeraldine, Rosaure ou Camille qui, aidées de leurs soubrettes, ne cherchent qu’à lui désobéir. Avare, méfiant, bougon mais parfois naïf, crédule et très rancunier, il veut jouer le jeune homme épris. Il est vêtu d’un justaucorps rouge et noir, bien serré à la taille et pourvu d’une volumineuse braguette pour attirer l’attention sur une virilité…défunte. Par avarice, il a conservé les chausses de sa jeunesse à présent trop longues pour ses jambes frêles. Il porte aussi un gilet rouge étriqué à gros boutons ainsi qu’une houppelande rouge ou, selon les époques, une ample simarre noire. Il est chaussé de sandales turques à pointe recourbée et coiffé d’un bonnet grec sans bords. Une bourse bien remplie pend à sa ceinture de laquelle il compte sans cesse son argent. Son masque de couleur pâle, blanc ou beige, est affublé d’un nez crochu à la forme d’un bec d’aigle qui s’orne parfois de verrues. On le reconnaît à sa barbe pointue sur un menton osseux, à sa longue et fine moustache et à ses gros sourcils. L’apothicaire Tartaglia est pourvu de grosses lunettes et affecté d’un fort bégaiement ; bedonnant et rêveur il est toujours dans ses pensées et dans sa poésie. Le médecin Cassandre (il Dottore), derrière quelques mots de latin, n’est qu’un fieffé ignorant.
      

Il y a aussi Matamore (il Capitan Spavento) à l’allure féroce, arrogant et autoritaire dont la traduction française le range dans les faux braves, fanfaron, vantard et peureux. À l’écouter il a mis en déroute, à lui seul, des armées entières et tenu tête à des milliers d’ennemis sans avoir été blessé. En réalité il n’a jamais combattu. Poltron, lâche et paresseux, avec pourtant le verbe haut, il n’est en fait qu’une poule mouillée.  Il est beau et vaniteux dans son costume flamboyant de soldat espagnol, son chapeau dont les énormes plumes tombent sur le côté, sa cape et son gros ceinturon où pend une grande épée. Son long et fort nez et de magnifiques moustaches lui confèrent un masque farouche et batailleur. Coviello, lui, est un charlatan de profession qui se veut spirituel dans ses blagues et ses pitreries ; il est proche du personnage du Capitan.

  
Matamore               ............................  Coviello            ..........    Arlequin....................Colombina           ...........   Lelio                    Isabella


Il y a encore la Signora, une femme bien mature et aussi superficielle qu’entremetteuse. Elle aime il Capitan et n’a de cesse de le charmer. Son valet et serviteur est Pedrolino. Le troisième groupe est celui des amoureux, touchants et ingénus, jeunes, beaux et instruits, férus de poésie et de chansons mais aussi habiles à tromper les barbons comme Pantalone. Sur leur chemin, se dressent toujours des obstacles à leurs mariages. Il y a aussi bien sûr Colombina, l’alter ego féminin d’Arlequin, au cœur de toutes les intrigues amoureuses. Orazio et Lelio, élégants, cultivés et pétris de bonnes manières, se couvrent parfois de ridicule car ils sont très centrés sur eux-mêmes et sur l’amour qu’ils portent à leur belle. Enfin Isabella, la fille de Pantalone, jeune, belle et élégamment vêtue, est un être à deux visages ; tantôt douce et tendre dans son rôle d’amoureuse elle peut se montrer capricieuse, perverse et d’une soudaine cruauté. Comme Lelio elle est centrée sur elle-même, elle est peu patiente, se décourage ou s’emporte facilement. Amoureuse mais remplie de doutes elle se pâme souvent. Elle aussi n’est que rarement masquée. Voilà en résumé les personnages costumés et masqués que vous pouvez retrouver au détour des canaux lors du Carnaval de Venise.

      Quatre d’entre eux sont pourtant incontournables et prennent le pas sur les autres figurants, il s’agit d’Arlequin, de Colombine, de Polichinelle et du médecin. Je vais donc approfondir un peu l’identité qui se cache sous leurs masques :

 

Encore porté de nos jours, on lui préfère les déguisements de Pedrolino (Pierrot) et Colombina. Il se compose d’une grande cape noire (le tabarro), d’un drap noir qui couvre l’arrière de la tête et le cou et d’un tricorne noir. Le masque, traditionnellement blanc, était autrefois de céruse (ce carbonate basique de plomb qui est un poison est interdit depuis 1915). Sa forme est particulière, quadrangulaire avec une pointe proémi-nente vers l’avant qui couvre le bas du visage et qui permet à celui qui le porte de boire et de manger sans le quitter et modifie sa voix. Pendant longtemps il a été l’apanage des aristocrates et symbolisait dans la discrétion toutes les débauches du Carnaval, les rencontres galantes et les amours interdites  


.Le Tabarro .................................La Bauta

Les femmes portent la moretta, un masque de velours noir rond ou ovale maintenu par les dents grâce à un bouton. Il était très en vogue en France lorsque des femmes voulaient rendre visite à des hommes sans être reconnues.
 

Les masques décoratifs muraux vénitiens sont de formes et de modèles divers. Leur prix est fonction de leur diamètre, de leur hauteur, de leur matière et de leur finition. Les plus représentatifs ont une hauteur de 28 cm et plus pour une largeur de 23 cm et plus. Ils sont très colorés. Parmi eux on distingue :

-                  Ceux en céramique : ils doivent avoir été peints à la main et porter le cachet qui en garantit l’authenticité, une estampille ronde avec la mention : Original / Hand painted (peint à la main) / Made in Italy / Venezia. Ils représentent essentiellement des femmes dont ils portent le nom : Giada, Sylvia, Livia, Mary… et sont des pièces uniques un petit détail différenciant chacune d’elles : les couleurs, une perle sur le front, une mouche sur la joue, des volutes pailletées etc…

Pages suivantes les masques de Sylvia, rose, mauve et noir (haut. 40 cm ; larg. 30 cm) et de Mary, masque flamme rose, bleu et doré (haut. 50 cm ; larg. 38 cm).

Dans cette catégorie, il y a aussi les modèles « Lune et Soleil » ou « Soleil » seul ou encore « Éventail ». Leurs motifs sont multiples, très colorés et peuvent se diversifier à l’infini pour réaliser des pièces uniques : oiseaux, fleurs, cygnes, portées de musique etc… Leur forme, notamment pour celui du « Soleil », est identique. Les modèles pages suivantes : haut. 42 cm ; larg. 38 cm.

 Ceux en papier mâché : ils ont le double avantage d’être décoratifs mais aussi, pour certains, de pouvoir être portés comme déguisement apparenté à un costume. Leur variété est également grande. Elle va du demi-masque de velours ou de satin noir (le loup) avec les masques d’animaux (notamment le chat et le papillon) à ceux de Colombine et du médecin à long nez. Ces masques-visage, ovales ou ronds, peuvent représenter toutes sortes de personnages comme la mauresque (haut. 54 cm ; larg. 28 cm) et offrir parfois une composition remarquable tel le soleil (haut. 70 cm ; larg. 52 cm).

Les masques costumés ont une finition généralement très soignée car ils intègrent des éléments particuliers, les clochettes pour le Joker ou Jolly, le chapeau pour Casanova et leur prix est en conséquence (environ 300 euros pour celui de Casanova alors que les masques décoratifs oscillent entre 30 et 100 euros).

On trouve dans cette catégorie aussi les représentants de la Commedia dell’Arte ainsi que les masques de dentelle, la bauta, Pinocchio, Pierrot, Colombine et bien d’autres. Certains d’entre eux ont des prix très abordables, de l’ordre d’une trentaine d’euros, parfois moins. Mais dès qu’ils sont réalisés artisanalement par des créateurs et fabricants de masques vénitiens, qu’ils soient de résine ou de papier mâché, qu’ils soient masques de fête, de carnaval, de comédie ou d’animaux, les prix s’envolent (entre 200 et 300 euros). Certaines merveilles peuvent atteindre les 1000 euros. Ce sont alors de véritables œuvres d’art dignes de tableaux de peintres. Ils sont toujours accompagnés de l’estampille vénitienne et d’un certificat attestant de leur authenticité : Maschere veneziane (masque vénitien) : Questa maschera veneziana è un lavoro originale d’arte creato da artisti della regione del Veneto, Italia. (Ce masque vénitien est une œuvre d’art originale créée par des artistes de la région de Vénétie, Italie).

Il y a encore des masques de résine au visage entouré d’une savante composition de tissu comme la courtisane ou le diable, les loups de luxe strass et dentelle de métal doré ou argenté, élégants et légers et encore les masques de cuir. Je vais terminer par deux originalités carnavalesques, le masque à manche et le masque à plumes.

 

Je pourrais encore vous parler longuement du masque vénitien d’autant plus qu’il faudrait lui associer le costume adéquat. Mélange de vérité et de mensonge, de sincérité et d’illusion, le masque permet de transgresser tous les préjugés tout en cachant, dans l’anonymat le plus complet, l’identité de celui qui le porte. C’est finalement l’école de la vie. Ah ! j’oubliais de vous dire ! Ne vous avisez jamais de lever l’incognito d’un masque qui pourrait vous importuner, c’est contraire aux lois du Carnaval. Je l’ai appris à mes dépens il y a plus de trente ans lors du Carnaval de Limoux où a lieu, depuis 1604 et durant trois mois, le plus long carnaval du monde et pendant lequel les arcades médiévales de la place de la République voient défiler chaque week-end (le samedi et le dimanche) pas moins d’une trentaine de bandes masquées accompagnées de leurs musiques (une à deux bandes par sortie). Les Limouxins y viennent pour se faire « chiner », tout d’abord par les meuniers qui ouvrent traditionnellement la première semaine du Carnaval avant d’être imités par les autres bandes les semaines suivantes. Sous l’incognito de leurs masques, de leurs longues carabènes qui ont remplacé les fouets d’antan, ils s’approchent d’un des nombreux badauds qu’ils ont reconnu dans la foule pour lui dire quelques mots à l’oreille. Parfois les propos ne sont pas gentils, parfois ce sont des reproches sur l’éventuel comportement qu’a pu avoir l’invectivé, parfois encore ce sont des propositions honnêtes…ou pas, parfois aussi des marques d’amitié et tout cela se termine par une poignée de confettis que le « masque » veut vous faire manger. Quoi qu’il en soit vous devez rester sans réaction et surtout accepter sans broncher les railleries ou invectives…ce qu’ignore le non initié qui de surcroît est étranger à la ville et n’en connaît pas les règles. En l’occurrence le « masque » qui m’avait reconnu m’avait chuchoté d’obligeantes paroles qui auraient dû me flatter…avant de me servir une belle ration de confettis qu’il voulait me faire ingurgiter à toute force. Lui saisissant le poignet pour stopper la dégustation de ces petits bouts de papier, je tentai, de l’autre main, de lui soulever le masque pour connaître l’identité du « chineur ». Il sembla surpris et, reculant, me fit comprendre par un signe que je ne devais pas faire cela. La fin de l’histoire est qu’en lui saisissant le poignet j’avais involontairement et maladroitement relevé la manche de son habit et noté la montre féminine que le « masque » portait. Simple fait du hasard je me retrouvai assis à côté « d’elle » lors de la soirée de clôture. Je lui dis qu’elle avait une belle montre mais qu’elle était reconnaissable. Elle sourit et n’en dit pas plus, son anonymat était préservé. Je sais donc depuis longtemps qu’il ne faut jamais « démasquer » un « chineur ». Il est vrai que depuis longtemps aussi je suis considéré, au travers des Confréries bachiques de la Haute Vallée de l’Aude dont je suis membre,Capitouls de la blanquette de Limoux, Sarments de pierre de Saint-Polycarpe, Chevaliers du Malepère entre autres, comme un Limouxin d’adoption. Et que vive Carnaval !

       N.B. Tous les masques reproduits ici sont de ma collection personnelle, les images ne sont donc pas soumises à des droits d’auteur.

LES MASQUES CERAMIQUES

SYLVIA SYLVIA ET MARY
MARY
LES MASQUES SOLEIL SOLEIL1  
SOLEIL2 SOLEIL3 SOLEIL4
SOLEIL5 SOLEIL6 SOLEIL7

LES MASQUES EN PAPIER MÂCHÉ

MAURESQUE SOLEIL DOCTEUR
LA MAURESQUE
LE SOLEIL
LE DOCTEUR
JOKER CASANOVA JOLLY
LE JOKER
CASANOVA
JOLLY

LES MASQUES DE RÉSINE

COURTISANE DIABLE COURTISANE2
LA COURTISANE
LE DIABLE
LA COURTISANE

LES MASQUES A MANCHE

ET INGRID MASQUE A PLUME

MASQUE A MANCHE PLUME MANCHE2

 

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